Jean-Marie Le Pen sera reconduit à la tête du Front national lors du congrès du parti samedi et dimanche à Bordeaux, alors que sa fille Marine s'impose de plus en plus comme son successeur probable.
Jean-Marie Le Pen sera l'unique candidat à la présidence pour un mandat théorique de 3 ans, dans un scrutin qui désormais a lieu au suffrage universel des adhérents.
Mais sa succession est bel et bien ouverte, et sa fille Marine a déjà annoncé son intention de briguer un jour la présidence du parti, indiquant aussi qu'elle "envisageait" de se présenter à la présidentielle de 2012 sous les couleurs du FN.
Dans une interview au Figaro samedi, Jean-Marie Le Pen reconnaît que le nouveau mandat qu'il sollicite ce week-end devrait "normalement" être le dernier.
Le président du FN affirme par ailleurs qu'il n'a "pas mis" sa fille Marine "sur orbite" pour lui succéder, pas plus qu'il n'a "favorisé son ascension médiatique ou politique".
Le président du FN avait jusqu'ici toujours refusé d'envisager publiquement l'hypothèse d'une retraite politique, laissant planer le doute sur ses intentions.
Vendredi, dans une interview à la Croix, il avait déjà reconnu qu'il était "raisonnable" de penser que 2007 marquait sa dernière campagne présidentielle en tant que candidat.
Parmi les atouts de la benjamine des trois filles de M. Le Pen, sa notoriété et sa popularité auprès des sympathisants du Front national: selon un sondage publié mercredi, 81% souhaitent la voir un jour succéder à son père.
Elle est aussi la seule candidate du Front à avoir réussi à se maintenir au second tour lors d'élections législatives 2007 désastreuses pour les frontistes.
Celle qui n'a jamais eu jusqu'à maintenant de responsabilité exécutive dans le parti demande désormais une "liberté d'action" pour mettre en oeuvre sa "méthode" de reconquête de l'électorat, après l'échec de la présidentielle et la déroute des législatives.
Et selon des sources concordantes, M. Le Pen devrait accéder à sa demande, en annonçant dans la foulée du congrès une nouvelle organisation du FN laissant la plupart des commandes exécutives à Marine Le Pen, au détriment notamment de Bruno Gollnisch, longtemps le dauphin désigné.
Mais Marine Le Pen arrive au pouvoir dans un parti mal en point, en crise financière et en proie à une grogne diffuse qui a conduit certains de ses cadres à se mettre volontairement sur la touche.
Carl Lang, ancien secrétaire général, pilier des fidèles de Jean-Marie Le Pen au moment de la scission de 1999, a ainsi décidé de ne pas se présenter aux élections du comité central, comme Martial Bild, délégué général adjoint, et une dizaine d'autres membres de l'actuel bureau politique (une cinquantaine de membres au total)
Une quinzaine de secrétaires départementaux du FN n'ont pas parrainé la candidature de M. Le Pen à la présidence du parti, et une demi-douzaine ont démissionné ces derniers mois, pour manifester leur désaccord avec une gestion jugée trop autocratique du parti.
Et plusieurs réseaux, courants, groupuscules de l'extrême droite qui ont jadis soutenu le FN ont aujourd'hui pris leurs distances avec le parti, voire envisagent désormais un destin séparé.
"Dans la mouvance nationale (NDLR l'extrême droite), il y a beaucoup de monde en dehors du FN, et c'est un petit peu préoccupant", reconnaissait récemment Bruno Gollnisch.
"Le FN demeure la seule formation politique représentative susceptible d'incarner le courant national, mais encore faut-il qu'il continue de le rassembler", avertissait-il.
"Il est évident que dans n'importe quel parti politique qui a subi un revers, il y a des gens qui ont des inquiétudes, des lassitudes", estime de son côté Marine Le Pen.
Mais ces inquiétudes passeront "avec le retour à l'action" et la "reconquête électorale".
"C'est ça l'objectif du congrès: c'est de rassembler tout le monde. Le FN a besoin de l'ensemble de ses sensibilités et de ses cadres", a-t-elle déclaré à l'AFP.